Montréal, lundi 28 avril 2025 — Le Conseil des arts de Montréal (CAM) et le Théâtre ESPACE GO, en collaboration avec les membres du comité de développement du prix*, sont fiers de dévoiler le nom de la lauréate du prix Jovette-Marchessault, dont la sixième édition est consacrée aux autrices : Rébecca Déraspe. Ce prix, qui vise la reconnaissance et le rayonnement de la contribution de femmes artistes du milieu théâtral montréalais, s’accompagne d’une bourse de 20 000 $, qui sera remise par le Conseil à la lauréate. Partenaire d’ESPACE GO, Air Transat remettra aux deux finalistes, Annick Lefebvre et Marie-Christine Lê-Huu, un aller-retour vers Paris.
« C’est avec une immense fierté que nous remettons le Prix Jovette-Marchessault à Rébecca Déraspe, une autrice sensible, vive et prolifique à la carrière impressionnante. Son besoin ardent de réparer le monde, palpable dans son écriture et faisant écho au climat politique actuel, nous rappelle à quel point nous avons besoin des voix d’artistes comme elle. Le Conseil des arts de Montréal est fier de célébrer sa plume exceptionnelle, qui fait rayonner le Québec et Montréal à l’étranger. »
– Nathalie Maillé, directrice générale

Citation de Rébecca Déraspe
« Ce prix, qui porte le nom d’une femme qui avait à cœur de garder les voix de ses prédécesseuses bien vivantes, m’émeut si fort. J’ai cette impression vertigineuse que Jovette Marchessault me prend la main pour me donner la force vive de continuer à témoigner du monde. Sur mes épaules, sur mon dos, dans mes heures d’errance face à mon ordinateur, s’ajoutent les mains de mes contemporaines, de mes contemporains, qui, en m’accordant ce prix, me font cadeau de leur soutien magnifique, nécessaire. Grâce à vous, j’ai le ventre rempli du désir de dire encore, de faire avec ce qui se défait, de chercher le théâtre dans mes colères intimes, de me mettre à vif même quand la brûlure des choses m’effraie, de fouiller mes propres structures dramatiques pour construire au plus près de la vérité. Grâce à vous, avec vous, j’ai envie de continuer à faire résistance. Les autrices dramatiques, toutes les autrices, celles qui prennent parole sur les scènes montréalaises et sur les autres, ailleurs, sont toutes magistrales, toutes courageuses d’écrire comme elles reçoivent le bruit des chaos dans leurs os, dans leurs veines. C’est avec elles que je veux écrire. Parce qu’à nous toutes, on trace une ligne de force nécessaire. »
RÉBECCA DÉRASPE
Avec une vingtaine de pièces portées à la scène en tout juste une décennie, la dramaturge Rébecca Déraspe déploie une fécondité impressionnante et crée une œuvre, traduite en cinq langues, qui accumule les honneurs. La diplômée en écriture dramatique de l’École nationale de théâtre du Canada, cuvée 2010, n’aura pas tardé à faire sa marque. Dès l’année suivant sa formation, la création au Théâtre d’Aujourd’hui de son texte DEUX ANS DE VOTRE VIE, couronné en 2012 du Prix auteur dramatique BMO Groupe financier, révèle la vivacité et la souplesse formelle de son écriture.
La dramaturge est portée depuis quelques saisons par un essor créatif remarquable. Pour la seule année 2022, sept pièces portant sa signature étaient programmées dans divers théâtres d’ici et d’ailleurs. Un panorama illustrant l’étendue des registres couverts par cette autrice, qui aspire à se renouveler sur le plan formel d’un texte à l’autre : adaptation, comédie, théâtre jeunesse (FAIRE CRIER LES MURS, un spectacle chanté pour adolescents), sans compter la reprise – après interruption pandémique – de la poignante création CEUX QUI SE SONT ÉVAPORÉS, une œuvre qui a remporté l’important Prix Michel-Tremblay du meilleur texte porté à la scène en 2020, en plus du Prix du meilleur texte dramatique – Montréal, décerné par l’Association québécoise des critiques de théâtre (AQCT).
Le théâtre de Rébecca Déraspe jouit en outre d’une reconnaissance qui déborde des frontières du Québec. Sa pièce chorale LES FILLES DU SAINT-LAURENT (écrite en collaboration avec Annick Lefebvre) a été initialement créée en novembre 2021 au Petit Théâtre de la Colline, à Paris. À la même période, FANNY voyait aussi le jour en France, à la Comédie de Reims, avant d’être jouée dans la Ville-Lumière, au Théâtre Ouvert. Le texte a par la suite fait l’objet de représentations au Théâtre du Bic et au Théâtre du Double Signe à Sherbrooke, en 2024.
Fine observatrice, celle qui aurait aimé être psychiatre, tant la créature humaine la passionne, ausculte ses semblables avec une grande sensibilité. Son écriture est mue par cette curiosité envers l’Autre, elle l’envisage comme un dialogue, une rencontre. D’où l’intrinsèque humanité de son théâtre. Rébecca Déraspe plonge dans les blessures et angoisses fondamentales de ses personnages, avec une empathie qui, néanmoins, n’empêche pas la dérision. Ce qui lui permet de traiter parfois avec légèreté de sujets graves, voire même risqués. Dotée d’un véritable don pour l’humour, elle aime danser sur cette ligne entre l’émotion et la comédie, un équilibre qui, avec le rythme de ses dialogues, rend son théâtre si engageant. En prise sur son temps, son œuvre marie aussi l’intime et le social. L’autrice met volontiers en lumière la pression sociale qui pèse sur les individus : ses personnages sont souvent confrontés aux modèles préconçus et aux jugements de leur entourage.
Rébecca Déraspe tisse une œuvre au féminisme affiché. Pour traiter des injustices historiques contre les femmes, elle n’a pas hésité à imaginer une sœur géniale de Shakespeare dans JE SUIS WILLIAM, consacré meilleur spectacle jeune public à Montréal par l’AQCT, en plus d’avoir reçu le Prix Louise-LaHaye décerné par le Centre des auteurs dramatiques (CEAD) en 2019. Récipiendaire pour la saison 2020-2021 de la bourse d’écriture Jean-Denis Leduc, remise par le Théâtre de la Manufacture, où elle est autrice en résidence depuis 2018, la dramaturge y développe la pièce LES GLACES, autour des questions très actuelles d’agression sexuelle et de consentement. Des enjeux difficiles, abordés avec d’infinies nuances et une grande délicatesse.
À travers plusieurs pièces, Rébecca Déraspe explore particulièrement la pertinente thématique de la maternité, du rôle maternel, ainsi que ses différents enjeux dans la société actuelle. Un questionnement qu’elle mène avec une audace et une liberté notables, touchant à des questions plutôt taboues. C’est le cas dans NINO, un texte aux échanges acérés qui a récolté une mention spéciale au prix Gratien-Gélinas en 2014, puis qui a été créé à Genève. Comme de l’affrontement costaud entre deux amies que met en scène GAMÈTES — une pièce récompensée par un Prix du meilleur texte dramatique – Montréal, de l’AQCT en 2017. C’est aussi sur cet aspect de la condition féminine — la charge des enfants — que s’interrogeait l’autrice dans sa version de MAISON DE POUPÉE en 2019, une actualisation du célèbre texte de Henrik Ibsen.
Non contente de signer moult pièces originales, Rébecca Déraspe se démarque également par le nombre d’adaptations que compte sa feuille de route théâtrale. C’est vers elle que Sophie Cadieux s’est tournée pour transposer avec crédibilité dans la réalité québécoise un monologue de la Française Noémie de Lattre, devenu FÉMINISTE POUR HOMME – GUIDE DE SURVIE POUR TOUS(TES).
L’autrice a également laissé son empreinte sur de grands textes classiques : LA NUIT DES ROIS de Shakespeare, traduit et adapté en collaboration avec le metteur en scène Frédéric Bélanger pour le Théâtre du Nouveau Monde, ROMÉO ET JULIETTE, ainsi qu’ANTIGONE de Sophocle (une adaptation à plusieurs mains), tous deux pour Le Trident à Québec.
Et depuis un an, on a retrouvé sa griffe sur deux transpositions de roman, très différentes : MEMBRANE, où le metteur en scène Cédric Delorme-Bouchard a fait appel à la plume de Déraspe pour insuffler de l’humanité au récit de science-fiction du Taïwanais Chi Ta-wei. Et tout récemment, sa version théâtrale du classique ORGUEIL ET PRÉJUGÉS de Jane Austen, montée au Théâtre Denise-Pelletier par Frédéric Bélanger. Une adaptation, accueillie avec éloges, qui accentue la modernité de la protagoniste du 19e siècle.
Ajoutez ce printemps la présentation de la nouvelle création de l’autrice, JANETTE, dans une mise en scène de Jean-Simon Traversy. Pas surprenant que ce soit elle que la compagnie Jean Duceppe ait choisie pour écrire cette pièce « en conversation avec » Janette Bertrand, qui retrace le parcours de l’icône ainsi que l’évolution de la condition des femmes au Québec.
Bref, l’étendue des capacités de Rébecca Déraspe n’a pas fini de nous épater.
*Membres du comité de développement du prix Jovette-Marchessault : Nahka Bertrand, Micheline Chevrier, Margarita Herrera-Dominguez, Lior Maharjan et Marie-Eve Milot
Ce prix du Conseil des arts de Montréal porte le nom de Jovette Marchessault en hommage à une grande « accordeuse d’âme », dont l’œuvre est parcourue par la volonté de rendre visible la culture des femmes, de reformuler l’Histoire, de fonder une mémoire qui permette aux femmes d’être des modèles pour tous et toutes. L’édition 2026 du prix Jovette-Marchessault s’adressera aux metteuses en scène. L’appel pour le début des candidatures débutera à l’automne 2025.
À PROPOS DU CONSEIL DES ARTS DE MONTRÉAL
Offrant différentes formes d’accompagnement, le Conseil des arts de Montréal repère, soutient et reconnaît l’innovation artistique et l’expression créative dans toute leur diversité pour faire rayonner les artistes et les organismes de création, de production et de diffusion montréalais. Jouant un rôle unique de catalyseur, il contribue depuis 1956 à faire de Montréal une métropole culturelle vibrante, reconnue ici et ailleurs pour sa vitalité artistique.
À PROPOS DU THÉÂTRE ESPACE GO
Depuis sa fondation en 1979, le Théâtre ESPACE GO se dédie à l’exploration des imaginaires de femmes artistes et à l’évolution de la pratique théâtrale. La poursuite cette mission lui confère un positionnement unique en Amérique du Nord et fait référence sur la scène internationale.
SOURCE
Luc Chauvette
Directeur des communications et du marketing
Théâtre ESPACE GO
lucchauvette@espacego.com